COVID19: vaccin classique ou vaccin ARN?
Une note du Prof. Pierre Sonveaux, Docteur en Sciences Pharmaceutiques, Directeur de Recherches du F.R.S.-FNRS.
Pourquoi un vaccin? Un vaccin permet d’éduquer notre immunité pour prévenir une attaque virale ou bactérienne. Il est donc utile avant une infection, mais ne permet pas de guérir une infection en cours. Sans vaccin, en cas d’infection et si une personne n’a jamais été confrontée au même virus pas le passé, l’immunité est ‘surprise’ et met du temps à réagir. Le virus a alors tout le temps de se propager, voire de tuer la personne. Il faut en effet du temps pour que l’immunité s’éduque et parvienne à trouver une solution pour se débarrasser du virus.
Un vaccin classique? Les vaccins classiques utilisent des fragments du virus pour éduquer notre immunité. A l’image d’un enfant à qui on montrerait un morceau de carrosserie d’une 2CV afin que, lorsqu’il en verrait une en vrai, il puisse dire sans hésiter ‘c’est une 2CV !’ Bien entendu, le morceau de carrosserie seul ne roulera jamais. De même, les morceaux de virus ne reconstitueront jamais un virus complet. C’est totalement impossible. Un vaccin classique génère essentiellement des anticorps contre le virus. Ces anticorps vont reconnaître très sélectivement le ou les fragments du virus contenus dans le vaccin. Ils reconnaîtront aussi très sélectivement les virus qui arborent ces fragments, et les détruiront. C’est le choix des fragments utilisés qui fera que la réponse immunitaire soit bonne ou moins bonne. De même, si je tentais d’expliquer à un enfant ce qu’est une 2CV en ne lui montrant qu’un rétroviseur, il aurait beaucoup plus de mal que si je lui montrais un capot avant. De plus, dans le meilleur vaccin, le où les fragments de virus choisis correspondent à des zones qui ne mutent pas ou très peu. C’est essentiellement le choix des fragments qui conditionne l’efficacité du vaccin. Des adjuvants sont ajoutés qui ‘réveillent’ nos cellules immunitaires afin de les éduquer rapidement. Le risque principal de ce type de vaccin est une réaction allergique (qui est facilement traitable avec des antihistaminiques ou, au pire, de l’adrénaline). L’inconvénient principal de ce type de vaccin est qu’il protège la personne pendant une période relativement courte (classiquement quelques mois à quelques années). Un rappel est souvent nécessaire.
Un vaccin ARN? Les vaccins ARN sont à l’étude depuis plus de 20 ans et sont utilisés dans des essais cliniques en cancérologie depuis plusieurs années. Leur avantage est qu’ils induisent à la fois une immunité cellulaire (les lymphocytes T, des cellules tueuses) et une immunité humorale (les anticorps). Or, certains lymphocytes T en particulier ont une mémoire à long terme. Ce type de vaccin est donc capable de protéger la personne sur une période longue (des années à des dizaines d’années). Ici, on n’injecte pas des fragments de la ‘carrosserie’ du virus, mais de l’ARN, c’est à dire une séquence courte qui sert de partition pour produire un morceau de carrosserie en particulier. C’est un peu comme si je montrais à un enfant une partie du plan qui permet de construire un 2CV afin qu’il puisse reconnaître la voiture lorsqu’il la verra en rue. Par exemple, un morceau d’ARN X peut servir à produire 10.000 capots, un morceau d’ARN Y 10.000 rétroviseurs, et un morceau d’ARN Z 10.000 phares avant gauches. Si je montrais 10.000 fois de suite à un enfant un capot, un rétroviseur et un phare avant gauche de 2CV, il aurait ensuite super facile à reconnaître une 2CV garée dans la rue. Pas vrai? Pratiquement, un ou plusieurs fragments d’ARN viral bien choisis, protégés par une capsule de composition semblable à celle des membranes de nos cellules, est/sont injecté(s), entre(nt) dans des cellules spécialisées qui sont appelées ‘présentatrices d’antigène’ et sert/vent de partition pour générer des milliers de copies de fragments de virus. Chaque fragment est présenté par les cellules présentatrices d’antigènes. A qui? D’une part aux lymphocytes T, les cellules tueuses, et d’autre part aux lymphocytes B, les cellules qui fabriquent les anticorps. Et voilà donc notre organisme super équipé pour contrer une infection virale ! Nos cellules immunitaires ont été éduquées par le vaccin à ARN. Quel est le risque de ce type de vaccin? Principalement une réaction allergique qui risque d’être pire qu’avec un vaccin classique (parce qu’il y a plus de fragments de virus produits), mais qui est normalement tout aussi facilement traitable avec des antihistaminiques ou, au pire, de l’adrénaline.
ADN ou ARN? L’ADN est la partition génétique primaire de nos cellules. Il est enfermé dans le noyau cellulaire duquel il ne sort jamais. Là, il est bien protégé, fortement condensé sur lui-même. Si notre ADN mute, nous risquons de développer des maladies génétiques et des cancers. L’ARN, par contre, est une partition génétique secondaire: il sert de messager entre le noyau cellulaire et le corps cellulaire. Il sort du noyau. Contrairement à l’ADN, il n’est pas très stable et se dégrade assez rapidement après avoir été lu et interprété. L’ARN de nos cellules est lu par les ribosomes qui fabriquent des protéines. Les virus à ARN usurpent et utilisent cette machinerie à leur avantage pour fabriquer des virus complets Les petits fragments d’ARN contenus dans les vaccins ARN utilisent aussi cette machinerie, mais ne fabriquent que des fragments de virus. En effet, l’ARN du virus contient toute l’information nécessaire à refaire de nouveau virus, alors que les petits fragments d’ARN des vaccins à ARN ne permettent de produire que des morceaux de virus (capot, phare avant gauche, rétroviseur, ..). Il est donc absolument impossible qu’un vaccin ARN produise des virus entiers. Et si le virus n’est pas entier, c’est qu’il est mort. L’ARN et l’ADN sont des molécules très très différentes. Il est donc absolument impossible qu’un ARN fusionne avec un ADN pour induire une mutation. Un vaccin ne peut donc pas induire de maladie génétique ou de cancer par ce type de mécanisme: c’est contraire aux lois de la Nature.
Un vaccin est-il efficace à 100% ? Non. Sans vaccin, c’est comme si une armée de 100 cellules immunitaires devait vaincre une armée de 10.000 virus. Dans un premier temps, les virus ont quasi toutes les chances de gagner et vous serez malade. Si les cellules immunitaires s’éduquent rapidement et se multiplient plus vite que le virus, vous survivrez. Si pas, vous mourrez. Il y a des cas où les cellules immunitaires sont faibles : les personnes immunodéprimées (par exemple, les greffés, les patients cancéreux, ceux qui ont des maladies du sang, les diabétiques, les obèses, …). Ces personnes-là ont plus de chances de mourir que les personnes ‘normales’. Mais des personnes ‘normales’ peuvent mourir quand-même. Personne n’est à l’abri. Avec un vaccin, c’est comme si une armée de 100.000 cellules immunitaires devait vaincre une armée de 10.000 virus. Dans ce cas, votre immunité a quasi toutes les chances d’emporter la bataille et vous ne serez pas malade. Cependant, il arrive qu’une armée de 10.000 batte une armée de 100.000. C’est rare, mais ça arrive. Et en particulier si l’armée de 100.000 est faible (mal nourrie, mal reposée, malade, …). De plus, construire une armée de 100.000 cellules immunitaires chez une personne immunodéprimée est quasiment impossible. Ces personnes n’ont pas le choix : leur protection dépend de la vôtre. En d’autres termes, si je refuse de me faire vacciner, je prends un risque non seulement pour moi-même mais aussi pour toutes les personnes immunodéprimées que je pourrais croiser. Le choix de se faire vacciner ou pas implique donc de mettre en danger la vie d’autres personnes ou pas. C’est bien plus qu’un choix personnel. Il faut se poser la question : ‘ma liberté vaut-elle plus que la vie de mes semblables’ ?
A chacun d’y répondre en âme et conscience…